Le chalutier classique
A l’orée du XXème siècle, des navires à propulsion mécanique commencent à entrer sur la scène de Terre-Neuve, à vapeur tout d’abord, ils seront suivis de navires équipés de moteurs diesel.. Ils bouleverseront les pratiques de la pêche puisque c’est à l’aide d’un chalut de fond qu’ils réaliseront leurs captures. Avec l’essor de ce type de navire, c’est la lente fin des trois mats et de leurs doris dont le dernier français sera le malouin René Guillon qui a désarmé en 1951. Sur ces chalutiers, appelés « classiques » avec le recul du temps, le terre-neuva n’est plus obligé de quitter son navire pour pêcher et se tient donc à l’écart des caprices des brumes qui rendaient son retour à bord aléatoire. Par contre, la pêche se fait sans interruption 24 heures sur 24 et le travail du poisson a lieu sur le pont découvert, exposé aux intempéries. Les opérations de traitement de la morue restent les mêmes que sur les voiliers, mais il faut en plus prendre soin du chalut et le ramender au plus vite lorsque par malheur il s’est déchiré sur une pointe rocheuse ou une épave. Sur les premiers classiques, deux chaluts étaient à disposition, l’un sur la lisse bâbord, l’autre à tribord, et l’on pêchait alternativement avec l’un et l’autre, ce qui obligeait à reprendre le gréement du train de pêche en permanence. Pour cette raison, le chalutage par tribord uniquement fut très vite adopté.
A bord de ces navires, le travail du terre-neuva est rythmé par le résultat du traict de chalut. On travaille tant que le poisson est là et, s’il est abondant, on rappelle du monde pour le « bal de nuit » qui s’organise sous la pâle lumière des « cargos » (système d’éclairage installé en balancine au dessus du pont de travail). Ce n’est que lorsque la morue se fait plus rare que vient le temps du repos, quelquefois après 36 ou 48 heures.
Entre les deux guerres, les navires furent équipés d’installations radio ce qui permit de rompre l’isolement avec la terre, mais surtout de communiquer avec les autres navires pêchant sur zone. Des informations codées sur la pêche étaient échangées entre capitaines d’un même armement ou que des affinités avaient rapprochés.
En 1958, l'"Alex Pleven", fut le premier chalutier à pont couvert. Certains "classiques" furent également transformés en pont couvert, ce qui permit de mettre des machines pour le travail de la morue et de transformer certains en semi-congélateurs [poissons congelés et poissons salés]. D'où leur nom de navires usine.