Les soins à bord
Chaque navire est muni d’un coffre à médicaments, vérifié chaque année par un pharmacien agréé et présenté a la Commission de visite avant départ. Ce coffre contient un bon nombre de médicaments d’usage courant, d’autres n’étant d’aucune utilité, compte tenu des faibles connaissances en médecine des capitaines qui n’avaient reçu que quelques rudiments pratiques pendant les cours.
Le coffre contient également une trousse chirurgicale sommaire : 1 bistouri, 2 pinces, 1 paire de ciseau, agrafes, attelles, plats émaillés pour petits bains...
Les maladies internes et graves sont plutôt rares, heureusement car sans radio, il est impossible de demander une consultation médicale. Les cas les plus fréquents sont des fractures, panaris, phlegmons, rhumatismes et angines, soignés consciencieusement suivant les indications du petit livre appelé « Médecin de papier ».
Les blessures sont soignées simplement au moyen de désinfectants : eau oxygénée, éther, alcool, teinture d’iode. Lorsqu’il y a fracture, il faut essayer de la réduire et poser des attelles. Pour les entorses on utilise un onguent fabriqué a bord avec du savon et de l’eau de vie ; pour les rhumatismes ; frictions a l’alcool camphré. Les panaris sont fréquents par suite des piqures d’hameçons et sont traités par des bains d’eau désinfectée a l’eau de javel ou au permanganate. .. l’eau est utilisée plusieurs fois a cause du rationnement.
Les résultats obtenus en appliquant les conseils de ce guide ne sont pas toujours satisfaisants. Dans les cas graves, on ne peut compter que sur la visite problématique du navire-hôpital d’assistance en mer. Il y a bien sur la solution d’une relâche à Saint-Pierre, situé parfois a plusieurs centaines de milles, mais la traversée peut faire perdre beaucoup de temps, ce qui compromet en partie le résultat de la campagne.
Il arrive qu’un homme décède à bord. D’après la loi, le corps ne doit pas séjourner plus de 24 heures a bord après le décès. Il est enserré dans un sac en forte toile et lesté. Pour l’immersion, le navire appareille et se déplace de 5 ou 6 milles. Le corps est placé sur un panneau reposant sur la lisse. Le voilier est mis en panne sans erre. L’équipage, tête nue, entoure le défunt. Apres une prière récitée par le Capitaine l’ordre est donné pour l’immersion, 2 hommes lèvent le panneau. Le corps glisse et disparait... Le navire reste encore une dizaine de minutes en panne, puis il retourne prendre son mouillage. C’est une bien triste cérémonie que l’immersion d’un humain au milieu de l’océan et le moral s’en ressent pendant quelque temps.